Le protecteur du dharma

Les pratiquants kadampas font traditionnellement des offrandes et des requêtes à Dordjé Shougdèn, le protecteur du dharma.

Cette pratique a pour but d’éliminer les obstacles et de rassembler toutes les conditions favorables pour leur pratique spirituelle.

Les centres bouddhistes kadampas du monde entier pratiquent les trois sadhanas du protecteur : Le joyau du cœur, Le joyau qui exauce les souhaits et Le tambour mélodieux.

Dordjé Shougdèn, le protecteur du dharma

Un protecteur du dharma est l’émanation d’un bouddha ou d’un bodhisattva. Ses principales fonctions sont : éliminer les obstacles intérieurs et extérieurs qui empêchent les pratiquants d’obtenir des réalisations spirituelles, et mettre en place toutes les conditions nécessaires à leur pratique.

Au Tibet, chaque monastère avait son propre protecteur du dharma. Cependant, cette tradition n’a pas commencé au Tibet. Les mahayanistes de l’Inde ancienne s’en remettaient également aux protecteurs du dharma pour éliminer les obstacles et exaucer leurs souhaits spirituels.

Certaines déités mondaines sont bien disposées à l’égard du bouddhisme et essaient d’aider les pratiquants, mais elles ne sont pas réellement des protecteurs du dharma. Elles peuvent accroître la richesse extérieure des pratiquants et les aider à avoir du succès dans leurs activités mondaines, mais elles n’ont ni la sagesse ni le pouvoir de protéger et développer le dharma dans l’esprit du pratiquant.

C’est ce dharma intérieur – acquérir la grande compassion, la bodhitchitta, la sagesse qui réalise la vacuité, et ainsi de suite – qui est le plus important et qui a besoin d’être protégé. Les conditions extérieures sont d’une importance secondaire.

Même si elles ont une bonne motivation, les déités mondaines manquent de sagesse. Aussi en réalité, l’aide extérieure qu’elles donnent peut interférer avec l’accomplissement d’authentiques réalisations du dharma. Si elles-mêmes n’ont aucune réalisation du dharma, comment peuvent-elles être des protecteurs du dharma ?

Il est donc clair que tous les véritables protecteurs du dharma doivent être des émanations d’un bouddha ou d’un bodhisattva. Ces protecteurs ont un grand pouvoir pour protéger le bouddhadharma et ses pratiquants, mais l’étendue de l’aide reçue dépend de notre foi et de notre confiance en eux. Pour recevoir une protection totale, nous devons nous en remettre à eux avec une dévotion constante, inaltérable.

Les bouddhas se sont manifestés sous la forme de divers protecteurs du dharma, tels que Mahakala, Kalaroupa, Kalinedéwi et Dordjé Shougdèn. De Djé Tsongkhapa jusqu’au premier Pantchèn Lama, Losang Tcheukyi Gyaltsèn, c’est Kalaroupa qui était le principal protecteur du dharma de la lignée de Djé Tsongkhapa. Plus tard, cependant, beaucoup de grands lamas ont senti que c’était Dordjé Shougdèn qui était devenu le principal protecteur du dharma de cette tradition.

La compassion, la sagesse ou le pouvoir des divers protecteurs du dharma sont les mêmes, mais à cause du karma des êtres sensibles, un protecteur du dharma particulier aura davantage la possibilité d’aider les pratiquants du dharma, à un moment donné.

Nous pouvons comprendre pourquoi il en est ainsi en considérant l’exemple de Bouddha Shakyamouni. Autrefois, les êtres de ce monde avaient le karma de voir le corps d’émanation suprême de Bouddha Shakyamouni et de recevoir des enseignements directement de lui.

De nos jours, cependant, nous n’avons pas un tel karma, et aussi Bouddha nous apparaît sous la forme de notre guide spirituel qui nous aide en nous donnant des enseignements et en nous guidant sur les voies spirituelles. La forme que prend l’aide de Bouddha varie donc selon notre karma qui est changeant, mais sa nature essentielle reste la même.

Parmi tous les protecteurs du dharma, en particulier Mahakala à quatre visages, Kalaroupa et Dordjé Shougdèn ont la même nature parce qu’ils sont tous des émanations de Mandjoushri.

Toutefois, de nos jours les êtres ont un lien karmique plus fort avec Dordjé Shougdèn qu’avec les autres protecteurs du dharma. C’est pour cette raison que Mortchèn Dordjétchang Kounga Lhoundroup, un maître très accompli de la tradition sakya, dit à ses disciples : « Maintenant le temps est venu de s’en remettre à Dordjé Shougdèn. » Il a dit cela à de nombreuses reprises pour encourager ses disciples à faire grandir leur foi en la pratique de Dordjé Shougdèn.

Nous devons également tenir compte de son conseil et le prendre à cœur. Il n’a pas dit que le temps était venu de s’en remettre à d’autres protecteurs du dharma, mais a affirmé clairement que le temps est venu de s’en remettre à Dordjé Shougdèn. De nombreux grands lamas de la tradition sakya et de nombreux monastères sakyas s’en sont remis avec sincérité à Dordjé Shougdèn.

Ces dernières années, la personne qui a particulièrement aidé la propagation de la pratique de Dordjé Shougdèn a été feu Tridjang Dordjétchang, le gourou racine d’un grand nombre de pratiquants guélougpas, depuis d’humbles novices jusqu’aux plus grands lamas. Il a encouragé tous ses disciples à s’en remettre à Dordjé Shougdèn et de nombreuses fois, il a donné des transmissions de pouvoir de Dordjé Shougdèn.

Vers la fin de sa vie, dans le but d’empêcher la dégénérescence de la pratique de Dordjé Shougdèn, il a écrit un texte important, intitulé Symphonie qui enchante un océan de conquérants, qui est un commentaire de Une infinité d’éons, une louange de Dordjé Shougdèn, de Tagpo Kelsang Khèdroub Rinpotché.

La nature et la fonction du protecteur du dharma

Certains croient que Dordjé Shougdèn est une émanation de Mandjoushri qui a pris l’aspect d’un être mondain, mais c’est faux. La forme même de Dordjé Shougdèn révèle la totalité des étapes de la voie du soutra et du tantra, et la forme des êtres mondains ne possède pas ces qualités.

Dordjé Shougdèn apparaît sous la forme d’un moine pleinement ordonné pour montrer que la pratique d’une discipline morale pure est essentielle pour atteindre l’illumination. Dans sa main gauche il tient un cœur qui symbolise la grande compassion et la grande félicité spontanée : l’essence de toutes les étapes de la vaste voie du soutra et du tantra.

Son chapeau jaune et rond représente la vue de Nagardjouna, et l’épée de sagesse dans sa main droite nous enseigne qu’il faut couper l’ignorance, la racine du samsara, avec la lame aiguisée de la vue de Nagardjouna. Ceci est l’essence de toutes les étapes de la profonde voie du soutra et du tantra.

Dordjé Shougdèn chevauche un lion des neiges, symbole des quatre non-peurs d’un bouddha, et il a une mangouste qui crache des joyaux sur son bras gauche. Celle-ci symbolise son pouvoir d’accorder la richesse à ceux qui placent leur confiance en lui. Son œil central au milieu du front symbolise sa sagesse omnisciente qui perçoit directement et simultanément tous les phénomènes passés, présents et futurs.

Son expression courroucée indique qu’il détruit l’ignorance, le véritable ennemi de tous les êtres vivants, en les bénissant avec la grande sagesse, et qu’il détruit aussi les obstacles qui se présentent à ceux qui pratiquent le dharma avec pureté.

Les bienfaits de s’en remettre à Dordjé Shougdèn

Si nous comprenons bien la nature et les fonctions de Dordjé Shougdèn, nous pouvons comprendre les bienfaits de s’en remettre à lui. Dordjé Shougdèn aide, guide et protège toujours les pratiquants purs et fidèles, en leur accordant des bénédictions, en faisant grandir leur sagesse, en exauçant leurs désirs et en faisant réussir toutes leurs activités vertueuses.

Dordjé Shougdèn n’aide pas seulement les kadampas ; puisqu’il est un bouddha, il aide tous les êtres vivants, y compris les non-bouddhistes. Le soleil est utile même à ceux qui sont nés aveugles, car il leur procure la chaleur et fait mûrir les récoltes qui seront leur nourriture, mais s’ils pouvaient recouvrer la vue, ces bienfaits ne seraient-ils pas encore bien plus évidents ?

De la même manière, bien que Dordjé Shougdèn protège même ceux qui ne font aucun effort pour s’en remettre à lui, lorsque ayant foi en lui nos yeux s’ouvriront, et que nous irons vers lui avec sincérité, nous deviendrons progressivement de plus en plus conscients de l’aide que nous recevons de lui.

Si notre désir de connaître les bienfaits de la pratique de Dordjé Shougdèn est sincère, nous devons nous en remettre à lui constamment, et améliorer continuellement notre lien avec lui sur une longue période. De cette manière, nous commencerons à nous rendre compte de son influence bénéfique sur notre vie.

Il faut comprendre que la principale fonction d’un protecteur du dharma est de protéger notre pratique du dharma, et non pas de nous aider dans nos affaires mondaines. Gardant cela présent à l’esprit, ne soyons pas découragés si nous ne devenons pas soudainement très riches, car la richesse n’aide pas nécessairement notre pratique spirituelle, et peut même être une grande distraction.

Si nous nous en remettons à Dordjé Shougdèn avec sincérité, il fera en sorte que les conditions de notre pratique du dharma soient très favorables, mais elles ne seront pas nécessairement celles que nous aurions choisies ! Dordjé Shougdèn bénira notre esprit pour nous aider à transformer les situations difficiles en la voie spirituelle, et ouvrira les yeux de la sagesse de ses fidèles disciples, ce qui les rendra capables de prendre toujours la bonne décision.

Pour plus d’informations au sujet de Dordjé Shougdèn, lisez Le joyau du coeur de Guéshé Kelsang Gyatso.
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